Comment deux milices vont-elles cohabiter au sein du CNDD-FDD : Bene Ntare vient détrôner les Imbonerakure

Cette dualité crée une tension latente : d’un côté, les Imbonerakure, toujours actifs et loyaux à Ndikuriyo ; de l’autre, Bene Ntare, une "ligue présidentielle" bâtie pour consolider l’autorité de Ndayishimiye et, selon certains, éclipser l’hégémonie des Imbonerakure.

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1.10.2025
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Politique

Une nouvelle ligne de fracture semble s’installer au sein du CNDD-FDD, parti au pouvoir au Burundi. Depuis quelques mois, une structure parallèle, baptisée Burundi Bene Ntare, attire l’attention et alimente de nombreuses inquiétudes. Selon plusieurs sources proches du noyau dirigeant, il ne s’agirait pas seulement d’une organisation culturelle comme le discours officiel le prétend, mais bien d’une nouvelle milice "de palais", directement rattachée au président Evariste Ndayishimiye et confiée à sa propre fille, Navie Keza Questia Madeleine Ndayishimiye.

Une figure controversée à la tête

Navie Keza Questia, qui se présente également comme PDG de la société Bene Ntare, multiplie les casquettes à l’image de sa mère. Officiellement, l’organisation a été créée au lendemain de l’investiture du président Ndayishimiye afin de "promouvoir la culture, l’identité et les valeurs burundaises tout en renforçant le sentiment d’appartenance nationale". Mais dans les coulisses, sa mission réelle semble bien différente.

Une milice parallèle aux Imbonerakure

Pour de nombreux observateurs, Bene Ntare représente aujourd’hui pour le général Ndayishimiye ce que la Ligue des jeunes Imbonerakure fut pour son prédécesseur Pierre Nkurunziza : une force de contrôle social et de coercition. Les Imbonerakure, tristement célèbres pour leur implication dans des violences et crimes politiques, notamment lors de la contestation du troisième mandat de Nkurunziza, restent pour leur part sous l’emprise idéologique du secrétaire général du CNDD-FDD, Révérien Ndikuriyo, héritier revendiqué de l’ancien président.

Cette dualité crée une tension latente : d’un côté, les Imbonerakure, toujours actifs et loyaux à Ndikuriyo ; de l’autre, Bene Ntare, une "ligue présidentielle" bâtie pour consolider l’autorité de Ndayishimiye et, selon certains, éclipser l’hégémonie des Imbonerakure.

Une mission sécuritaire voilée

Derrière le discours culturel, Bene Ntare se déploie déjà sur le terrain avec un rôle sécuritaire marqué. Ses jeunes membres, dotés de talkies-walkies Motorola, assurent une surveillance rapprochée jusque dans les collines les plus reculées. Leur mission va au-delà de la simple veille sécuritaire : ils traquent également les "égarements" des Imbonerakure, ce qui fait craindre une confrontation entre les deux structures.

Vers un chaos annoncé ?

Certains analystes estiment que la coexistence de ces deux milices, parallèles et concurrentes, pourrait à terme plonger le pays dans une spirale dangereuse. Le spectre des dérives observées en République démocratique du Congo avec les milices privées comme les Wazalendo hante les esprits. Un affrontement entre Bene Ntare et Imbonerakure, loin de renforcer le pouvoir central, pourrait semer le chaos et fragiliser davantage un pays déjà marqué par de profondes cicatrices politiques et sociales.

Alors que les ambitions du président Ndayishimiye de remodeler son pouvoir se dessinent, la question reste ouverte : la création de Bene Ntare est-elle une stratégie de survie politique ou le début d’une nouvelle ère d’instabilité au Burundi ?

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