Un tweet et un coup d'État, pas de différence: Atteinte à la sécurité intérieure de l’Etat, une arme populaire pour la dictature de Gitega

Le Burundi est devenu un véritable Etat totalitaire où l'arme privilégiée d'oppression est devenue une justice qui a autant peur du crime fourre-tout d'atteinte à la sécurité intérieure de l'Etat que le sont tous les citoyens, même ceux qui n'ont pas les moyens ni intellectuels ni physiques pour porter « atteinte à la sécurité intérieure de l'Etat » !

Par
Burundi Daily
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21.10.2023
Categorie:
Justice

Dans quel monde un tweet qui dit que : « A ce moment où le Burundi croupit dans la misère sans précédent à cause du leadership défaillant, le parti CODEBU invite la population à ne pas céder à la démission » est vu et interprété comme une atteinte à la sécurité intérieure de l'Etat ?

Car c'est de cela qu'est accusé Kefa Nibizi, le leader du parti CODEBU, après que son équipe de communication politique ait tweeté un message à l'intention de ses partisans et des Burundais en général. En passant, une critique à la fois vraie et méritée, car disons-le, l'élite dirigeante est responsable de l'état dans lequel se trouve le pays.

Cette accusation d'atteinte à la sécurité intérieure de l'Etat est devenue un crime fourre-tout, déployé pour « pendre » tous ceux qui critiquent l'élite dirigeante ou ceux qui s'associent de quelque manière que ce soit à ceux qui critiquent l'élite du parti au pouvoir.

C'est le même crime pour lequel la journaliste Floriane Irangabiye est emprisonnée. Pour avoir interviewé dans son émission de radio des invités critiques à l'égard des autorités burundaises, elle s'est retrouvée avec ce crime impardonnable autour du cou. Un crime si familier à tous les juges du pays que quiconque en est accusé, même si les preuves n'existent pas, ne peut qu'être déclaré coupable.

Floriane Irangabiye, journaliste emprisonée pour "Atteinte à la sécurité intérieure de l'Etat"

« Atteinte à la sécurité intérieure de l'Etat », un crime dont l’essence est que l’État et ceux qui gouvernent à un moment donné sont les mêmes. Un crime qui part du principe que le droit d'un dictateur de s'accrocher au pouvoir fait partie de l'intégrité de l'État. Un crime qui renforce l’idée selon laquelle critiquer ou vouloir rivaliser sur la scène politique avec ceux qui sont au pouvoir est une atteinte contre l’État.

Un crime en somme, devenu la carte secrète et magique que les procureurs ne sortent que pour mettre aux oubliettes ceux qui sont perçus comme une menace aux dirigeants. Un crime pour intimider des opposants internes ou externes ainsi que des concurrents potentiels au sein de son propre camp.

Un tweet et un coup d'État, pas de différence

Tenez, l'ancien premier ministre Allain Guillaume Bunyoni accusé d'avoir voulu renverser Evariste Ndayishimiye, l'actuel président du Burundi, un ancien ami des années de rebellion et son concurrent interne actuel, est accusé et écroué pour « atteinte à la sécurité intérieure de l 'État ».

Kefa Nibizi, leader d'un parti politique relativement méconnu au pays, pour avoir eu la témérité de critiquer l'élite dirigeante via un tweet aussi inoffensif que limité dans sa portée dans un pays où seul un faible pourcentage de la population sait lire et écrire le français ; langue dans laquelle le tweet a été rédigé ; est accusé d’« atteinte à la sécurité intérieure de l’Etat »

Face à cette absurdité pseudo-juridique, une mascarade déployée pour abuser et restreindre la liberté et les droits de ceux qui les critiquent, pourquoi les dirigeants du Burundi semblent-ils surpris, voire en colère quand le monde libre continue de les accuser de brutalité, de crimes d'Etat et un manque général de respect des droits de l'homme ?

Ce crime d'atteinte à la sécurité intérieure de l'Etat a sans doute contribué à construire une bulle de superficialité et une chambre d'écho où non seulement l'ego fragile des gouvernants est protégé à tout prix mais aussi où toute concurrence, qu'elle soit réelle ou perçue est écrasée par tous les moyens!

Le Burundi est devenu un véritable Etat totalitaire où l'arme privilégiée d'oppression est devenue une justice qui a autant peur du crime fourre-tout d'atteinte à la sécurité intérieure de l'Etat que le sont tous les citoyens, même ceux qui n'ont pas les moyens ni intellectuels ni physiques pour porter « atteinte à la sécurité intérieure de l'Etat » !

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