Histoire de machettes au Burundi: Un « terroriste » et un opposant « radical » disculpent le régime CNDD-FDD
Après une avalanche de tweets émanant de la ferme à trolls du régime qui blanchissent le CNDD-FDD, une nouvelle aide au régime de Gitega est venue de sources inattendues. De Jérémie Minani, opposant en exil depuis 2015. Il a été qualifié par le régime de « figure de l'opposition radicale » ; et du MSD dirigé par Alexis Sindihuje qui est accusé d'être terroriste par le régime de Gitega.Sur le ton habituellement vu dans les rapports des ONG et des instances internationales, Jérémie Minani et Alexis Sinduhije publient un "rapport" qui dédouane le régime.
Pour quiconque connaît l’histoire de la région des Grands Lacs, notamment au Burundi et au Rwanda, où les machettes sont associées au génocide et aux massacres, il n’est pas surprenant qu’une histoire de soi-disant distribution de machettes au Burundi par le parti au pouvoir provoque l’histérie.
Quelles que soient les réalités de cette prétendue distribution, cette affaire des machettes mortifères fait sa première victime sur le terrain journalistique : Sandra Muhoza est dans la nasse du SNR.
Il y a quelques jours, le journaliste d'investigation, Bob Rugurika, a créé un buzz avec son récit sur l'importation, via la Tanzanie, de milliers de machettes made in China. La nouvelle avait également été annoncée par le Journal en ligne, le Mandat, dont l'initiateur est un proche de Bob Rugurika, car journaliste à la RPA que dirige Bob.
Dans une longue émission, diffusée par des médias sociaux, Bob Rugurika a fermement soutenu ses révélations en jurant éclairer davantage la lanterne de ceux qui en douteraient. Il a accusé le Secrétaire général du CNDD-FDD Révérien Ndikuriyo ainsi que le chef de l'Etat Evariste Ndayishimiye comme étant à l'origine de la cargaison qui tue.
Contrairement à leur habitude, les caciques du régime CNDD-FDD ne se sont pas encore exprimés officielement, préférant laisser les trolls et agitateurs du régime s'attaquer au journaliste Rugurika et faire faire une contre-attaque bien coordonnée sur les reseaux sociaux.
Cependant, le parti présidentiel a organisé en catastrophe une réunion à sa permanence de Bujumbura en présence de grosses pointures du parti dont le chef de l'Etat et le président de l'Assemblée. Révérien Ndikuriyo aurait traité le sujet de secret-défense tandis que Gélase Ndabirabe, président de l'Assemblée Nationale, s'est pris pour un dindon de la farce dans la mesure où il n'avait pas été mis au courant de ce plan.
Pour l'Ambassadeur Willy Nyamitwe, ancien béret vert de la communication du système CNDD-FDD, l'histoire des machettes a été inventée de toutes pièces. C'est du déjà vu, pour lui.
« A l'instar des accusations portées en avril 2024 contre le Chef de l'État Evariste Ndayishimiye, et le SG du parti au pouvoir, Révérien Ndikuriyo, il vous souviendra qu'en avril 2016, la FIDH avait fait la même chose contre le Président Pierre Nkurunziza et le Président du Parti Cndd-Fdd, Pascal Nyabenda. La propagande #Génocide et distribution de machettes au #Burundi est du déjà-vu », a-t-il déclaré sur son compte X (anciennement twitter).
Aujourd'hui comme hier, il y voit la main de la RPA. « Le journal "Le Mandat" qui a lancé la rumeur a été créé par un certain Emile Nibasumba, de la RPA. Le Mandat, la RPA et leurs animateurs sont principalement basés au Rwanda voisin. Leurs faits et gestes contribuent à envenimer les tensions entre le Burundi et le Rwanda».
Pendant ce temps, le système rugit à l'interne et veut faire tomber des têtes. L'enquête porte sur celui ou celle qui aurait vendu la mèche ou selon le régime celui ou celle ou qui aurait propagé les rumeurs. C'est dans ce cadre qu'une journaliste qui travaille à Ngozi ( au nord du pays), Sandra Muhoza est détenue au secret par les renseignements pour, dit-on, avoir tenté d'enquêter sur cette affaire à Ngozi. Dans un groupe Whatsapp dont elle est membre, elle aurait en effet affirmé que l'histoire des machettes est sérieuse.
L'opposition radicale entre dans le jeu de communication pour dédouaner le CNDD-FDD
Après une avalanche de tweets émanant de la ferme à trolls du régime qui défendent et blanchissent le CNDD-FDD, une nouvelle aide au régime de Gitega est venue de sources inattendues. De Jérémie Minani et Alexis Sinduhije. Opposant en exil depuis 2015, Jérémie Minani est qualifié par le régime de « figure de l'opposition radicale ». Alexis Sindihuje qui est accusé d'être «terroriste» par le régime de Gitega dirige le parti MSD qui a été rayé de la liste des partis politiques au Burundi. Il est aussi accusé par le régime d'être un des initiateurs d'une rebellion menée par le RED-TABARA.
Sur le ton habituellement vu dans les rapports des ONG et des instances internationales, Jérémie Minani et Alexis Sinduhije affirment avoir mené des enquêtes au Burundi et n'avoir trouvé aucune preuve de distribution de machettes.
La question qui taraude l'esprit de nombreux observateurs est de savoir qui a demandé ces deux opposants d'enquêter et de publier leurs conclusions qui exonèrent le CNDD-FDD. Y a-t-il une contrepartie pour ces deux exilés, longtemps en désaccord avec le régime qu’ils disculpent aujourd’hui ?
Le journal le Mandat, qui avait été le premier à annoncer cette distribution de machettes, a emboîté le pas et a rétracté l'article. Dans un communiqué publié sur son site Internet, le rédacteur en chef de la revue indique qu'« après une évaluation approfondie, notre Rédaction a trouvé qu'elle s'est précipitée et qu'elle a fait une erreur d'appréciation parce que tous les éléments cruciaux pour la diffusion de cet article, selon les règles particulières de l'agence pour un dossier pareil, n'étaient pas encore rassemblés."
Un vrai mea culpa ? Véritable manque de preuves pour sa publication ? Rien n'est sur. Peut-être qu'Alexis Sinduhije, qui a des liens avec le rédacteur en chef du Journal Le Mandat, a exercé une certaine influence sur cette rétractation.
Bob Rugurika suivra-t-il la même voie et retirera-t-il également son histoire ? Lui aussi entretient des liens de longue date avec Alexis Sinduhije.
Quelle que soit la vérité sur cette histoire de machettes, la stratégie de communication adoptée par le régime et l’entrée dans la danse de Jérémie Minani et Alexis Sinduhije montrent qu’ « il y a quelque chose de pourri dans l’empire du Danemark»