N'écoutant que le CNDD-FDD au pouvoir, la CVR officialise le « un génocide contre les Hutus » du Burundi: En a t-elle la qualité ou compétence?

Selon des observateurs, la CVR n'a été guidée que par l'unique sentiment de haine poisseuse en vers les tutsis. Sans contester la gravité des crimes commis dans les deux camps adverses en 1972, d'aucuns se demandent pourquoi elle a fermé les yeux sur les autres tragédies qui émaillent l'histoire du Burundi, en l'occurrence celles de 1993 (génocide contre les tutsis, reconnu et qualifié par l'ONU). D'autres estiment que la CVR n'a ni la qualité, ni la compétence d'officialiser un génocide. C'est une prérogative du Conseil de sécurité de l'ONU ou des instances judiciaires.

Par
Burundi Daily
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21.12.2021
Categorie:
Politique

L'Ambassadeur Pierre Claver Ndayicariye, actuel président de la Commission Vérité/Réconciliation (CVR) et deux fois président de la Commission électorale (CENI), a le sentiment d'un devoir commandé et accompli.

Devant le parlement réuni en congrès, il a eu le privilège de proclamer « le génocide perpétré contre les membres de la communauté ethnique hutu en 1972 et 1973 ». Il s'agit, selon le président de la CVR, des résultats des enquêtes approfondies menées, trois ans durant, par la CVR dans les quatre coins du Burundi.

« Nous déclarons solennellement ce 20 décembre 2021 que le crime de génocide a été commis contre les Hutu du Burundi en 72 et en 73 ». Selon Daniel Gélase Ndabirabe, président de l'Assemblée Nationale du Burundi, cette déclaration « était attendue depuis très longtemps ».

Pierre Claver Ndayicariye a présenté pendant plus de trois heures un épais rapport de plus de 5000 pages qui se veut être un condensé des résultats des années d'enquête centrées exclusivement sur ce que les Burundais appelaient jusqu'ici « les évènements de 72 ».

Comme chacun s'y attendait, la CVR s'en est particulièrement pris au colonel Michel Micombero, président d'alors et issu de la minorité tutsie.

« Les violations graves, massives et systématiques des droits de l'homme qui ont visé la majorité hutu en 1972 et 1973 avaient été planifiées en amont par le pouvoir du président Michel Micombero ».

Dans la foulée, le président de la CVR est revenu, à plusieurs reprises, sur quelques provinces burundaises abritant majoritairement des membres de la communauté ethnique tutsie, horriblement incriminée comme auteure dudit génocide, en l'occurrence Bururi et Mwaro.

Cette qualification historique et tant attendue par les hutus aujourd'hui au pouvoir a été endossée par acclamation par les deux chambres du parlement burundais.

Selon son président Pierre Claver Ndayicariye, la CVR du Burundi a, pendant tout ce temps, auditionné environ 900 témoins dont des responsables présumés de ces massacres, elle a exhumé les restes de près de 20 000 victimes dans quelque 200 fosses communes, ou encore étudié des milliers de documents relatifs à cette période.

Reste que le travail de la Commission ne s'arrête pas là. Dans les prochains jours, elle va s'atteler à l'identification de toutes les victimes de cette période qui passe par un recensement sur chaque colline du pays ainsi que l'organisation d'audiences publiques.

Selon des observateurs, la CVR n'a été guidée que par l'unique sentiment de haine poisseuse en vers les tutsis. Sans contester la gravité des crimes commis dans les deux camps adverses en 1972, d'aucuns se demandent pourquoi elle a fermé les yeux sur les autres tragédies qui émaillent l'histoire du Burundi, en l'occurrence celles de 1993 (génocide contre les tutsis, reconnu et qualifié par l'ONU).

D'autres estiment que la CVR n'a ni la qualité, ni la compétence d'officialiser un génocide. C'est une prérogative du Conseil de sécurité de l'ONU ou des instances judiciaires.

Créée en 2014, la très contestée CVR du Burundi avait la lourde tâche d'enquêter sur les crimes commis dans ce pays depuis la Conférence de Berlin de 1885 à la fin de la guerre civile en 2008. Mais la CVR a centré son enquête sur cette sombre période.

Dans un pays en proie à des violences cycliques entre les deux principales ethnies hutu et tutsi, c'est un précédent historique risqué et dangereux à créer : mettre en place une commission motivée par des considérations politiques et au mépris total des accords d'Arusha qui ont institué une telle commission , guider ladite commission pour classer et déclarer un crime hors de toute procédure légale. Voilà ce qui est dangereux!

Ce torpillage d'un processus qui avait été clairement tracé par le consensus entre les négociateurs d'Arusha, est l'aboutissement d'un processus politique qui a été détourné par une élite politique sans vision. Des commissions vérité et réconciliation ont existé, plus récemment en Afrique du Sud et en Irlande du Nord : les deux commissions ont suivi des processus juridiques clairs pour parvenir à des conclusions claires.

Au Burundi, le processus semble avoir été extrêmement politisé et les résultats sont loin de la vérité et ne font rien pour réconcilier le peuple burundais.

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