Le régime de Gitega face à son propre piège: L’affaire Alexis Nimbona passe du drame national au scandale international
En s’en prenant à des citoyens binationaux, le régime internationalise malgré lui la preuve de ses dérives. Les dénégations officielles et les tentatives d’obscurcir la réalité deviennent intenables, car des diplomates étrangers découvrent directement les mécanismes de cette répression systématique.Interrogée, l’ambassade de Suède a confirmé suivre de près la situation. Lars Halvardsson, conseiller et chef de chancellerie, a déclaré à BurundiDaily : « Nous sommes au courant de cette affaire et traitons tous les cas consulaires conformément à la législation suédoise. »
La disparition d’Alexis Nimbona, citoyen suédois d’origine burundaise, place le Burundi au cœur d’un scandale diplomatique sans précédent. Arrêté le 12 septembre 2025 à son arrivée à l’aéroport de Bujumbura, brièvement relâché, puis convoqué de nouveau par le Service national de renseignement (SNR), il s’était volatilisé.
Plus d’une semaine après son arrestation arbitraire et sa disparition forcée, ll est désormais établi qu’il est détenu dans la prison du siège central des services secrets à Bujumbura. La Commission nationale indépendante des droits de l’homme (CNIDH) a pu lui rendre visite et a confirmé sa détention. Mais cette visite semble moins témoigner d’un réel souci de protection des droits humains que de la pression exercée par l’ambassade de Suède. En effet, la CNIDH, loin d’être indépendante, s’est montrée largement indifférente au sort de ceux qui sont arrêtés et portés disparus de manière arbitraire, s’est jusqu’ici montrée particulièrement conciliante avec le SNR et, dans certains cas, a même couvert des arrestations arbitraires.
Le motif de cette incarcération d'Alexis Nimbona reste dérisoire : il est accusé d’avoir exprimé, lors d’une conversation privée en transit aérien, des propos critiques à l’égard du régime du CNDD-FDD, dénonciation rapportée par un compagnon de voyage. Il semble donc avoir été balancé par la personne avec qui il discutait lors de son transit.
En ciblant désormais des citoyens binationaux, le régime de Gitega s’expose lui-même. Ce qui, depuis 2010, était nié ou maquillé comme des « bavures » internes — disparitions forcées, détentions arbitraires, torture — devient visible aux yeux d’ambassades étrangères, contraintes d’intervenir pour assurer une assistance consulaire aux binationaux pris pour cibles par les pratiques prédatrices du régime de Gitega et la brutalité notoire de ses services de sécurité. L’affaire Nimbona agit comme un révélateur : derrière l’arbitraire des arrestations, ce n’est pas le crime organisé qui est puni, mais la simple critique politique d’un régime répressif.
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Cette dynamique relève en quelque sorte d’une forme d’auto-sabotage du pouvoir burundais. En s’en prenant à des citoyens binationaux, il internationalise malgré lui la preuve de ses dérives. Les dénégations officielles et les tentatives d’obscurcir la réalité deviennent intenables, car des diplomates étrangers découvrent directement les mécanismes de cette répression systématique.
Interrogée, l’ambassade de Suède a confirmé suivre de près la situation. Depuis Dar es Salaam, Lars Halvardsson, conseiller et chef de chancellerie, a déclaré à BurundiDaily : « Nous sommes au courant de cette affaire et traitons tous les cas consulaires conformément à la législation suédoise. » Une réponse diplomatique prudente, mais qui marque déjà une internationalisation de l’affaire.
En s’en prenant à ses propres citoyens comme à ceux de la diaspora, le régime envoie un message sans équivoque : il ne se soucie plus de l’opinion internationale. De même, en se bornant à de simples déclarations symboliques, la communauté internationale — et tout particulièrement l’Union européenne, principal bailleur de fonds du régime burundais — manifeste son indifférence face aux exactions dont ses citoyens sont victimes. Pendant ce temps, l’aide continue de parvenir au régime, laquelle est détournée pour renforcer sa répression à l’encontre de sa propre population.
Face à ce scandale, le silence n’est plus une option. Si la communauté internationale — en particulier la Suède et l’Union européenne — se limite à des déclarations symboliques, elle cautionnera implicitement une politique de disparition et de peur. Un régime qui réduit ses citoyens ou membres de la diaspora au silence par la peur et la disparition ne mérite en aucun cas le moindre soutien, même symbolique, de la part de la communauté internationale.